Questions - Réponses ! Professeures de mathématiques

Marie-Béatrice VIVIER et Maïté HANNI, professeures de mathématiques au collège Salvador Allende de Bourgoin-Jallieu nous parlent de leur métier : professeure de mathématiques

Bonjour Mesdames, avant tout merci de partager ce petit moment en notre compagnie. Alors les mathématiques c’est fantastique ?

Un grand Oui !

J’ai toujours aimé la satisfaction de trouver la solution d’un problème compliqué après avoir longtemps cherché.

Les maths demandent de la discipline, de la rigueur, de l’entraînement et c’est par définition un langage qui permet de traduire des phénomènes et des objets abstraits. On apprend beaucoup de bases de connaissances sur les nombres, la géométrie, les calculs aux cycles 3 et 4 sans pouvoir toujours connaître leur utilité concrète.

Les maths sont un domaine qui me plaît mais le choix d'exercer en tant que professeur, c'est avant tout pour former des citoyens capables de réfléchir par eux-mêmes.

Un des objectifs au sein de notre établissement est de faire « chercher » les élèves. On s’appuie sur les énigmes de Christophe Auclair grâce à notre équipement en tablettes. Chaque élève et chaque personnel va, sur un temps défini, chercher d’une manière ludique et gratuite les solutions. L’objectif est d’amener le goût de l’effort et de se dépasser. Dans un deuxième temps nous projetons de faire venir les classes de CM2 pour partager un moment avec nos élèves de 6ème, pour qu’ils cherchent eux aussi les énigmes et découvrent en même temps le collège et notre salle informatique.

Une des clés est de leur montrer que le monde qui nous entoure est plein de mathématiques, partout, que les mathématiques peuvent être ludiques. Il faut les amener sur des activités qui les amusent, et petit à petit mettre des concepts mathématiques sur ces activités.

Les élèves disent souvent "les fractions c’est trop compliqué, on n’y arrive pas, on ne comprend pas ce que c’est. "Et pourtant des fractions, on en fait tous très régulièrement. Quand on partage un gâteau ou une pizza, on fait des parts égales et donc des fractions. Si on peut montrer aux élèves ce genre de concept qu’ils connaissent et côtoient tous les jours, alors finalement les mathématiques peuvent être amusant.

Depuis quelques années au collège on fait passer le concours Castor. Cette année on n’a même fait venir certaines classes de CM2 du secteur. C’est une façon ludique de travailler et une approche de la logique informatique qui est importante aujourd’hui pour les élèves. On y ajoute un peu d’enjeu car nos élèves sont rarement classés au niveau national, et donc nous faisons un classement au niveau de l’établissement en récompensant ceux qui ont les meilleurs résultats à ce concours. D’ailleurs il y aura une remise des prix lors de cette semaine des maths. En plus d’apporter aux élèves une autre approche des mathématiques, cette récompense permet également de faire briller des enfants qui habituellement ne sont pas mis en lumière, car ce sont des choses différentes. Certains arrivent donc à avoir de très bons résultats alors qu’à priori ils ne sont pas spécialement bons en mathématiques.

Cela permet d’en motiver certains. En plus cette année, ce sont nos anciens élèves, actuellement au Lycée Jean-Claude Aubry, qui ont fabriqué les médailles en usinage, une façon de faire du lien avec les lycées de secteur, en plus des CM2. On essaie de faire un projet global qui dure même hors de la semaine des maths, et montrer que chacun a son rôle à jouer dans tout ça.

C’est une exposition que nous avons faite venir l’an dernier au collège sur laquelle nous avons emmené tous nos élèves de 6ème,5ème et quelques 4ème, ainsi que les élèves de CM2, un moment intéressant pour créer du lien. Pour les élèves c’est une approche des mathématiques ludique et originale avec beaucoup de manipulation. On peut faire des maths en bougeant des pions, sans nécessairement prendre une feuille et faire des calculs ou travailler sur de l’abstrait, c’est très différent.

Effectivement, au collège, toutes les professeures de mathématiques sont des femmes.

Dans la société en général, les stéréotypes sont encore bien présents avec quelques petites améliorations encore trop lentes à notre gout. Souvent les maths sont liées à la physique, à l’informatique où dans les études supérieures nous retrouvons beaucoup de garçons. C’est un peu moins valorisé que dans certains métiers du domaine médical, du sport où là, finalement, il existe une certaine parité. C’est la mise en valeur des domaines qui est quelquefois encore à la traîne dans le domaine de l’égalité filles-garçons.

Lutter contre les stéréotypes de genre reste compliqué car nous avons des familles et des élèves qui restent très ancrés dans ces stéréotypes. Malgré tout, à notre niveau on peut déjà montrer aux filles qu’elles sont bonnes en maths, aussi bonnes voire meilleures que les garçons au collège, et vraiment les valoriser sur leurs résultats. On pourrait également leur montrer que des femmes scientifiques célèbrent existent. On peut citer des hommes scientifiques célèbres, quand est-il des scientifiques mathématiciennes célèbres ?

Sophie Germain qui réalise des travaux dans l’arithmétique et Ada Lovelace, la première à avoir inventé le programme informatique, même si bien évidemment ce n’est pas toujours son nom mis en avant dans ce groupe de chercheurs sur le projet à l’époque, mais effectivement on en a quelques-unes.

On peut aussi envisager de faire venir au collège des filles qui font des études scientifiques pour avoir des modèles et montrer que les filles sont capables de réussir en sciences également.

Des élèves qui sont en confiance humainement dans cette mini-société qu’est le collège où ils n’ont pas instinctivement envie d’être. Pour nous c’est un apport de connaissances et surtout un élève acteur dans son apprentissage. Ce n’est pas facile de juger une bonne journée, car enseigner n’est pas dans l’immédiateté, les bienfaits de recevoir un enseignement sont sur le long terme. Finalement quand ils seront grands, qu’ils utiliseront un pourcentage pour comprendre leur fiche de paie, qu’ils utiliseront des figures géométriques pour aménager leurs futures maisons, c’est là qu’ils se souviendront que les maths servent aussi à ça. On pourra alors savoir si les journées ont été bien réussies ou non, et si l’école a alors accompli sa mission !

De mon côté, ma fille qui donnait un cours particulier de maths il y a deux jours, m'a dit à la fin de la séance : "Je crois avoir compris quand on est content dans ton métier, c’est quand on voit s’allumer dans les yeux de son élève une lueur de compréhension." Et effectivement quand on voit s’allumer cette lueur, on est très heureux. J’ai également l’impression d’avoir réussi quand un élève s’est mis en action, et même s’il m’a trouvé une solution qui n’a rien à voir avec le résultat, et qu’il est arrivé au bout du problème proposé avec sa réponse, sans forcément utiliser la méthode voulue, mais qu’il a persévéré et est allé jusqu’au bout.

Enseigner est un métier magnifique. Nous avons une grande responsabilité puisque l’on forme les adultes de demain. Nous sommes là pour leur apprendre à réfléchir par eux-mêmes, à résoudre des problèmes, mais malheureusement c’est aussi un métier difficile et le métier d’enseignant est très mal considéré. Ce n’est pas pour rien qu’aujourd’hui il y a une crise de vocation et c’est bien dommage car encore une fois c’est un métier magnifique.

Les voyages scolaires, ils forment la jeunesse (rires).

Moi je vais me la « péter » un peu comme disent les jeunes. Mon meilleur souvenir remonte à la classe de seconde où pendant une heure j’ai été la star de la classe. Notre prof de maths avait grondé toute la classe parce qu’on s’était tous trompés au contrôle de maths : « Vous allez tous retravailler ça chez vous !!!! » Au moment de franchir la porte, il m’avait glissé : « Vous Mademoiselle ce n’est pas la peine, vous avez 20. » Cela s’était répandu dans tout le lycée... cela faisait plaisir.

Mise à jour : juin 2023