Ce jeudi 10 novembre, les élèves du lycée Pravaz à Pont de Beauvoisin (Isère) avaient mis les petits plats dans les grands pour célébrer la journée nationale de lutte contre le harcèlement scolaire et le cyber harcèlement et accueillir par la même occasion Madame Insel, rectrice de l’académie de Grenoble. Arche de bienvenue, tee-shirt dédié, bracelet, badge éphémère, plaque pyrogravée, autocollant, marque-page, ballons, hall redécoré, le tout dans une tonalité de bleu, couleur du dress code oblige.
Sans oublier des stands interactifs, les sourires de rigueur et la motivation qui va avec…
La forme...
« Pour sensibiliser la communauté éducative aux phénomènes de harcèlement dans le milieu scolaire, la journée nationale de lutte contre le harcèlement est organisée au mois de novembre. Cette journée est l’occasion de rappeler combien la prévention et la lutte contre le harcèlement sont fondamentales pour permettre aux élèves d’avoir une scolarité épanouie dans le cadre de la priorité donnée au bien-être. » Voilà pour les directives officielles.
Un objectif sensiblement partagé par l’équipe dirigeante de l’établissement dont Éric Philippe, CPE, et accessoirement adjoint au maire de la commune, se fait le porte-parole : « Le postulat de départ dans laquelle s’intègre la manifestation d’aujourd’hui, c’est la contribution de toutes et de tous à l’amélioration du climat scolaire. »
Trente-six rentrées scolaires, ça aide à prendre du recul, mais pas une raison cependant pour « rester dans ses pantoufles » dixit monsieur Philippe qui nous rembobine le fil de cette journée : « Durant la crise des gilets jaunes, des actes violents sont apparus dans l’établissement. Un épisode qui a mis en avant les faiblesses de l’établissement dans le sens où un certain nombre de lieux, notamment l’allée centrale, dans lesquels les élèves ne se retrouvaient plus. De façon très collective, très collégiale, avec le conseil de vie lycéenne, la maison des lycéens, le chef d’établissement, il a fallu que l’on mène une réflexion pour proposer aux élèves des locaux qui leur correspondent, avec l'idée qu'un élève heureux est un élève qui va réussir et s'impliquer. »
Une réflexion qui aura porté ses fruits quant à la réorganisation des espaces de vie du collège : « Nous avons pu ouvrir un deuxième pôle scolaire dans l’allée centrale, une nouvelle cafétéria, transformer un patio en terrasse bois et enfin acheter un piano, tout ça dans une vision globale de l’amélioration du climat scolaire. »
… et le fond !
La première pierre posée avec un nouvel espace de travail adapté, restait désormais à faire évoluer les mentalités, apaiser les relations entre élèves et sensibiliser au harcèlement, l'objectif du jour. Le moment pour Mélanie Moreira d'entrer en scène. Enseignante de gestion et professeur principale de la classe de Terminale Agora (Assistance à la gestion des organisations et de leurs activités), elle revient sur l'idée de cette journée : «« Dans un premier temps, mon but était de former les élèves. C'est bien beau de travailler et lutter contre le harcèlement mais nos lycéens avaient besoin de prérequis. C'est à ce moment-là que nous avons eu l'idée de faire appel au rectorat, notamment à Madame Sandrine Menduni (Déléguée académique vie lycéenne et collégienne et Référente égalité au niveau académique). Elle nous a proposé plusieurs formations pour nous épauler. Nous avons également rencontré une psychologue, une association, un gendarme. Une fois les élèves armés, on s'est dit on y va, on mène des actions. La première a été de faire de ce jeudi 10 novembre une grande journée de sensibilisation au lycée Pravaz. »
Pour faire court, un 10 novembre qui débute donc par un accueil musical et une remise de badges éphémères, avant une mobilisation des élèves pendant 4h00 sur un « Hackathon » par équipe. Le thème de ce défi est : « Comment pouvons-nous agir contre le harcèlement scolaire au lycée Pravaz afin d’en améliorer le climat scolaire ? » Une matinée rythmée également par une diffusion de SLAM crées et enregistrés par les élèves de TP Agora.
La pause méridienne est l’objet d’une sensibilisation contre le harcèlement scolaire à destination des adultes de l’établissement.
L’après-midi voit un temps de présentation des projets « Hackathon » aux membres du jury, sans oublier une récréation en musique avec de nombreux stands et animations (distribution de bracelets, flyers, selfie, club égalité le harcèlement de rue, arbre à messages, mur des expressions, jeu quizz, gendarmerie, maison de protection des familles, tribunal judiciaire), avant de clôturer la journée par la célébration des idées innovantes « Hackathon » et la remise des prix.
Une journée et plus encore !
Bref, une journée bien chargée, mais les actions des lycéens contre le harcèlement ne se limitent pas à cela. Madame Moreira développe : « On travaille beaucoup avec la ville de Pont de Beauvoisin et on a décidé de sensibiliser au niveau local. Les élèves ont alors réalisé une bande dessinée qu'ils sont allés distribuer dans tous les points stratégiques de la ville où un enfant est susceptible d'attendre, par exemple chez le dentiste, au laboratoire, à la pharmacie. Tout le monde a joué le jeu et nos affiches se retrouvent placarder dans toute la ville, côté Isère et côté Savoie. »
Ce n'est pas tout. Les chiffres sont là. C'est au collège que l'on harcèle le plus, même si l'école primaire, malheureusement, en esquisse les prémices. Pourquoi ne pas, comme l'a justement suggéré madame la rectrice lors d'échanges constructifs avec les élèves et enseignants de l'établissement, « établir des ponts entre l'école élémentaire et le lycée ? » Une idée aisément partagée par madame la professeure principale qui, par des actions précédentes, a pu noter « combien les petits aimaient venir chez les très grands ». Une action est mise en place dans ce sens : « Nous allons sensibiliser toutes les classes de l'école primaire de Pont de Beauvoisin avec la collaboration de l'équipe enseignante et de la directrice. Nous avons demandé aux élèves de travailler en amont les prérequis du harcèlement, ils vont réaliser des dessins sur lesquels nous allons nous appuyer pour construire ensemble une définition du harcèlement et sensibiliser toutes les classes, avec notamment un travail sous forme de jeu. »
« Les réceptions des ambassadeurs sont toujours réussies » !
Clin d’œil aux plus anciens amateurs de chocolats, façon de dire que les ambassadeurs « non au harcèlement » du lycée Pravaz sont énormément investis, Des élèves acteurs de premier plan de cette lutte contre le harcèlement dont la mission ô combien déterminante est de sensibiliser leurs pairs.
Ces élèves ambassadeurs justement, nous les avons interrogés. A quelques instants du « grand oral » devant leurs professeurs, ils se sont exprimés sur cette journée. Les avis sont unanimes. Que ce soient Chainese, Caroline, Evan, Joan ou Pape Sahir, tous ont le sentiment d'avoir épouser une juste cause : « Aujourd’hui on lutte contre le harcèlement. Nous allons présenter un panorama à destination des professeurs et ensuite nous allons voir quinze classes présenter leur hackathon, leur idée à chacun pour lutter contre ce phénomène. Ce peut-être autant une musique qu'une affiche ou une danse, on est impatient de voir cela. C'est toujours une fierté de participer à un événement qui touche les plus jeunes jusqu'aux adultes, on a l'impression de se sentir utiles. »
Une fierté partagée par leur enseignante, Mélanie Moreira : « oui je suis fière car ils ont mené le projet de A à Z. Je leur ai un peu imposé le thème et finalement ils ont tous adhéré. Ils se sont mobilisés et aujourd'hui je peux dire que j'ai quinze ambassadeurs. »
Champagne !
Des élèves aux enseignants en passant par l'équipe de direction, les avis sont unanimes, la journée est réussie et l'engagement citoyen au rendez-vous. S'il fallait une preuve chiffrée de cet investissement payant, il faut se tourner vers Monsieur Philippe : « Tous ces projets menés à bien ont contribué à améliorer le climat scolaire. Ce dernier s'est apaisé depuis trois ans. Je me réjouis aussi du taux de participation des élèves au dernier CVL, un peu plus de 50% au Lycée Pravaz alors que la moyenne académique est aux alentours des 41%. Cela démontre un gros investissement et un gros travail sur l'éducation à la citoyenneté. »
Même son de cloche du côté des élèves : « Sur les stands nous avons vu beaucoup de jeunes se présenter, contents de participer et qui appréciaient le projet. A ce moment-là on se dit que nous avons réussi à mobiliser beaucoup de monde et faire passer notre message. »
Dernière marche désormais madame Moreira ? « La participation au concours national non au harcèlement avec comme mission de créer une affiche. » La professeure principale nous dessine les contours du projet et voit plus loin : « Nous avons pris une photo via un drone avec des élèves qui ont écrit au sol les lettres NAH. On va essayer de s'en servir et voir ce que nous pouvons produire à partir de cela. C'est aussi un moyen de valider les compétences de notre référentiel bac Agora. » D'une pierre deux coups en somme puisque cette journée fait partie intégrante de la réalisation de leur chef d’œuvre.
Une enseignante et des élèves dont les yeux pétillent.
Avec un tel engouement, le verdict national risque bien de voir d’autres bulles pétiller de bonheur… Le bonheur et l'espoir d'une école aux relations saines et apaisées, une école où tout le monde dit Non Au Harcèlement.
La lutte contre le harcèlement est une priorité nationale, au cœur des préoccupations de l’académie de Grenoble
Mise à jour : novembre 2022