Questions - Réponses ! Samuel Blanc, professeur des écoles en devenir

Les inscriptions au concours de l’enseignement sont prolongées ! L’occasion de donner la parole à des enseignants ayant connu une toute autre carrière professionnelle avant de tenter le pari du professorat. C’est le cas de Samuel, 38 ans, originaire de Rouen.

Les inscriptions au concours de l’enseignement sont prolongées ! L’occasion de donner la parole à des enseignants ayant connu une toute autre carrière professionnelle avant de tenter le pari du professorat. C’est le cas de Samuel, 38 ans, originaire de Rouen. Ce dernier a fait le choix de quitter son métier d’ingénieur pour privilégier l’humain et donner plus de sens à sa carrière. 

On va donc commencer par « ta vie d’avant », quel est ton parcours professionnel ?

J’ai fait des études en sciences de l’environnement à Rouen. J’ai commencé ma carrière professionnelle en tant qu’ingénieur en hydraulique dans un bureau d’étude, et ce pendant quinze ans, toujours à Rouen. J’ai évolué de manière logique et gravi les échelons en termes de responsabilités jusqu’à former d’autres ingénieurs juniors. Je me plaisais bien dans mon métier mais à la fin j’en avais fait un peu le tour ; eau potable, assainissement… J’ai eu l’opportunité de venir dans la région de Grenoble en suivant ma compagne. J’ai continué pendant un an en tant qu’ingénieur hydraulique à Échirolles mais j’ai perdu un peu du sens dans mon métier. Je suis devenu manager et ne gérais que des problèmes. J’avais envie d’autres choses, dont plus d’humain.

Et puis un beau jour tu décides de devenir enseignant. Pourquoi ce choix ?

Ma mère était institutrice pendant quarante ans, j’ai donc vu d’un œil extérieur quel était son métier. Elle était beaucoup en maternelle et ça me plaisait. En arrivant à Grenoble, j’avais deux filles de 4 et 7 ans, je me suis dit pourquoi pas se tourner vers ce métier-là ? J’ai fait un bilan de compétences qui m’a permis d’accéder à un poste de remplaçant, et ça m’a plu.

Ce n’était donc pas forcément une vocation ou un rêve d'enfant ?

Non, pas forcément, ça me trottait dans la tête mais je n’étais pas prêt à 23 ans. Via mon métier d ‘ingénieur en faisant des réunions, j’ai pris conscience que je pouvais être à l’aise à l’oral devant des adultes ou des enfants. J’aurais pu le faire plus tôt que 37 ans, mais cela s’est fait comme ça et je suis très heureux maintenant. Je me forme tous les jours et n’ai pas d’appréhension. 

Être enseignant aujourd’hui, ça veut dire quoi pour toi ?

C’est un autre mode de vie. Nous sommes vraiment impliqués avec nos élèves, on les voit plus de six heures par jour et donc nous sommes un peu des référents pour eux, certes pour les apprentissages mais également pour leur apprendre à être de futurs citoyens. On leur enseigne l’éducation civique, on leur apprend à vivre ensemble, à accepter le regard de l’autre, à avoir des émotions positives ou négatives, à accepter l’avis de l’autre, savoir prendre sa place. Ce n’est pas juste du français, des maths, des sciences, il y a toute la vie qui va autour. On accompagne les enfants et je trouve cette facette, autre que les apprentissages, très intéressante.

Ce que tu préfères dans ton nouveau métier ?

La polyvalence. C’est dur de cibler un seul aspect mais le fait de toucher à tout, c’est vraiment intéressant, on peut approfondir dans le temps. A moyen terme, j’aimerais bien avoir des idées et convaincre mes collègues de monter un projet avec une ou plusieurs classes voire l’école entière. J’ai un profil plutôt scientifique donc au départ ce serait surtout en maths ou en sciences/environnement, avec un large panel d’actions possibles en dehors de la classe. 

Le plus difficile ?

En tant que jeune enseignant, c’est être sûr de soi. Pour les enseignants reconvertis, je pense que nous avons l’aisance de part notre expérience mais le fait d’être crédible, de se sentir à notre place alors que l’on débute, c’est une difficulté. Après on n’est pas tout seul, il ne faut pas hésiter à demander conseil à nos collègues, à toute l’équipe éducative, les conseillers pédagogiques, ou encore les maîtres formateurs, nous ne sommes pas seuls dans notre classe.

Ta carrière dans le privé est-elle un point d’appui pour ton enseignement ?

Oui, pour l’aisance à l’oral et l’organisation. Vu que j’étais manager, la dernière année j’avais besoin d’avoir une vision, une programmation de mes échéances, donc c’était important de faire un planning pour voir comment m’organiser. Cela me sert maintenant en classe pour la gestion du temps à la journée, la semaine mais aussi au mois, et à fortiori à l’année. Il y aussi l’aisance à l’oral avec le fait de devoir parler devant du monde en réunion, cela me sert aussi.

Selon toi la qualité requise pour être un bon enseignant ?

Outre la polyvalence, je dirais s’adapter. On prévoit quelque chose mais ça ne se passe pas comme prévu, ce n’est pas la peine de s’accabler, il faut faire un travail sur soi et passer à autre chose, sachant que l’on a du temps pour s’améliorer.

La phrase que tu dis le plus dans une journée, ou le mot ?

Qu’avez-vous retenu ? Soit d’une consigne à court terme, soit au bout d’une séance d’apprentissage, ce que les élèves ont appris et compris, sans qu’ils remplissent des feuilles inutilement. Ils reformulent et s’ils n’ont pas compris, on continue différemment.

Certains jours tu regrettes ta décision ?

Pas pour l’instant. C’est vrai que c’est un autre rythme, intense, avec deux fois trois heures devant les élèves. Ensuite nous avons la liberté de nous organiser pour préparer et corriger comme on le veut. Pour l’instant je ne regrette pas et je pense que je ne le regretterai pas. C’est une décision mûrement réfléchie qu’il ne faut pas prendre sur un coup de tête car il s’agit d’un changement de vie et d’organisation.

Samuel si j’ai bien compris tu es deux jours à l’école et deux jours à l’INSPÉ, que t’apporte cette alternance ?

Oui je suis le jeudi et vendredi dans ma classe et le lundi et mardi nous avons des cours de pédagogie et didactique. On peut parler également de nos problèmes et de nos ressentis en classe, ce qui pour moi est fondamental, car être « lâché » dans une classe tout seul rapidement, ce serait compliqué. C’est déjà rassurant d’être à mi-temps pour pouvoir préparer la classe. Les deux autres jours en classe, nous sommes avec des professeurs, c’est vraiment la base du métier que les jeunes étudiants apprennent en Master 1 et 2. Nous avons une sorte de formation accélérée à mi-temps sur l’année et c’est vraiment très intéressant. 

Combien êtes-vous dans votre classe ?

Nous sommes une promotion de 140 divisés en 3 groupes de 30 et même parfois en travaux pratiques à 15. Il y a des thèmes sur lesquels on peut vraiment échanger, la transversalité, le français, les maths ou ce que l’on a envie de dire.

Quel est le ressenti général de ton groupe ?

C’est très divers car nous venons d’horizons très différents, il y a des boulangers, des comptables, des architectes, des anciens ou anciennes  AESH , il y a vraiment tous les profils. C’est intéressant et enrichissant de voir les parcours de vie et pourquoi ils ont décidé d’être professeurs. On prend chacun des idées de nos anciens métiers, on essaye de les appliquer dans nos classes. On se donne des trucs et astuces via un groupe WhatsApp, cela crée une cohésion au sein du groupe.

Dernière question, décalée, c’est l’instant récré, quel a été ton meilleur souvenir à l’école ?

Je dirais que c’est vraiment un plaisir général, le plaisir de venir à l’école, l’ambiance avec mes copains et copines, mais aussi avec mes professeurs. C’est vraiment un bon souvenir global d’envie d’aller à l’école, d’envie d’apprendre.

Mise à jour : novembre 2022