Questions - Réponses ! Jean-Pierre PATANE, professeur de coiffure
Jean-Pierre Patane est à la fois professeur de coiffure au lycée Jacques Prévert de Fontaine (38) et également gérant d'un salon de coiffure à Gières (38). Il nous conte, avec sincérité et bonne humeur, ses deux passions.
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Non, ce n’est pas courant, mais j'ai eu l'occasion, on m'a proposé ça l'année dernière et c'est vrai que l'idée m'a plu. C'était vraiment la curiosité, je me demandais comment j'allais arriver à allier les deux mais bon, pour l'instant, c'est plus que positif. C'est une belle expérience.
J’ai des enfants donc déjà, l'éducation, le rapport avec les jeunes. Nous, on a souvent des apprentis en salon, donc ça nous donne déjà une idée de la formation, mais j'étais persuadé que ça aurait une autre image, que ça serait un travail complètement différent que celui du maître d'apprentissage, donc le fait de le faire directement dans l'enseignement, à la source, je crois que c'est ce qui m'a plu. C'est me dire voilà, aujourd'hui on a besoin de recréer cette motivation, de parler aux jeunes différemment et le fait de démarrer à la base, je trouvais que c'était une très bonne solution. On m'a proposé ça l'année dernière par le plus grand des hasards, J'étais membre de jury et j'ai discuté avec une des enseignantes du lycée Jacques Prévert, c'est comme ça que le projet est né.
Si je pars vraiment de mon parcours professionnel en tant que jeune apprenti, j'ai fait un CAP et un BP en menuiserie à l'âge de 16 ans, je me suis engagé à l'armée, je suis sorti de l'armée à 19 ans, je suis venu travailler au rectorat de Grenoble (le monde est petit !), et ce pendant 10 ans, et ensuite seulement, je suis parti en coiffure. Donc vous voyez que les reconversions… comme je dis toujours quand il y a des jeunes qui me disent « Je veux m'orienter, mais est-ce qu'il n’est pas trop tard ? », je dis toujours qu'il n’est jamais trop tard, puisque moi je me suis réorienté à 29 ans. Donc, j'ai passé mon CAP et mon BP à 29 ans, et après j'ai une carrière de coiffeur jusqu'à présent, plus qu’épanouie.
La menuiserie, l'imprimerie au rectorat… donc finalement l’imprimerie, pour les couleurs, la menuiserie pour la coupe, finalement j'ai réussi à allier le tout.
Je crois que le côté positif c'est de rester connecté, justement, en ayant les deux casquettes. On reste connecté avec le monde professionnel, puisque ayant mon salon, je continue de la formation au sein du salon. Le fait d'être dans un établissement scolaire, ça nous permet justement d'avoir une piqûre de rappel de choses qu'on a vu il y a 20 ans, 25 ans et finalement de se remettre en route avec les élèves et de rester finalement en lien avec les bases du métier, ce qu'on oublie souvent quand on est professionnel.
C’est tout frais mais heureusement j'étais énormément épaulé par les enseignants qui sont avec moi, par les collègues sur place. Ce qui est compliqué ce n’est pas de lier les deux, ce qui est compliqué c'est que le métier d'enseignant est un métier, c’est-à-dire qu’on ne s'improvise pas enseignant. Il y a une structure, un mode de fabrication d'un cours, de gestion d'une classe, d'organisation de TP, et donc pour tout ça on a besoin de gens expérimentés pour nous orienter. Ensuite le côté riche, c'est que justement nous, on va apporter ce qu'on a moins en établissement scolaire : c'est la connaissance pratique du moment, l'expérience pratique qui est là depuis des années. Mais par contre il n’y a pas de difficulté à partir du moment où on a envie, ce n'est pas insurmontable du tout.
Pour l'instant, je pense que je ne délaisserai pas l'un pour l'autre. Le fait de lier les deux est pour moi très très très enrichissant.
Déjà les connaissances du métier, expérimenter la pédagogie et avoir de l'amour, parce que je pense vraiment qu’il faut aimer son métier et les élèves pour leur apporter des connaissances. Je peux vous raconter une petite anecdote, en début d'année je leur ai demandé un petit peu vers quoi ils se destinaient, est-ce que la coiffure leur plaisait ? Alors tout de suite, il y en a qui m'ont dit "ah mais moi l'année prochaine j'arrête" et quelques jours après, une de ces élèves qui avait un look, un style que je trouvais bien à part, on s'est mis à discuter, je lui dis "mais tiens c'est marrant que tu veuilles t'orienter sur autre chose, pourtant quand je te vois travailler…" et du coup je lui ai montré des choses que d'anciens apprentis à moi faisaient et qui ont ouvert leur salon, je disais "bah tiens regarde, tu vois par exemple elle, c'était une apprentie" et là, elle m'a dit "ah mais c'est ça que je veux faire moi, si je fais ça je n’arrête pas la coiffure !", et en fait on s'aperçoit que si vraiment on sort du cadre scolaire, et qu'on vient leur montrer des choses plus pro, des choses plus liées aux tendances actuelles, des choses qui sont de la vie actuelle, on est sorti du scolaire, finalement, c'est ce qui leur plaît. Je pense que ces jeunes viennent en voie Pro parce que justement, ils veulent sortir du scolaire , donc ils veulent travailler, et donc on a besoin de leur apporter ces connaissances-là, il leur faut du concret.
Ah oui, moi je pense que la voie professionnelle, la voie de l'apprentissage, pour moi ce sont des voies qui dans les professions manuelles, dans les professions de l'artisanat, sont des voies très, très importantes.
Alors la coiffure, contrairement à ce qu'on peut imaginer ou ce qu'on peut voir quand on rentre dans un salon, ça vous demande une bonne condition physique, de l’endurance, de la culture générale, un bon relationnel, tout ça. Ce sont vraiment des choses que j'essaie de démontrer à ces jeunes-là parce qu'aujourd'hui, faire de la coiffure, ça ne s'arrête pas seulement à embellir les gens, il y a tout un ensemble psychologique, il y a une démarche pour durer, perdurer dans le temps, il faut apporter tout ça, c’est-à-dire que vous ne pourrez pas faire que de la coupe de cheveux et du brushing. Si on veut perdurer, il faut arriver à aller au-delà de ça, et au-delà de ça veut dire s'enrichir de beaucoup de choses en parallèle. Donc ça demande quand même pas mal de connaissances, à la fois techniques et psychologiques.
Je pense que oui, il faut être de bonne humeur tous les jours, être capable de s'adapter à des situations, capable de s'adapter aux collègues et aux clients, mais comme dans beaucoup de professions, je crois.
Je leur parle de mon expérience, j'essaie d'analyser vraiment leurs besoins et quand je sens qu'il y a justement ce doute, à savoir si on va perdurer ou continuer dans cette branche, alors là, j'y vais et j'essaie vraiment de leur faire découvrir les facettes du métier qu'ils ne connaissent pas du tout aujourd'hui, et leur montrer que c'est un métier qui est passionnant et qui peut être très enrichissant dans tous les sens du terme, c'est un métier passion.
Je crois, et c'est ce que je leur explique beaucoup, que cette image-là, c'est à nous de nous la créer, par la culture générale, par l'expérience, par la technicité, par les connaissances. Je crois que quels que soient les métiers de l'artisanat, quels que soient les métiers manuels, c'est simplement notre travail qui va nous permettre de de démontrer qui on est, donc pour ne pas souffrir d'une image, on va dire parfois négative, il suffit tout simplement d'être soi et de donner le maximum, d'aller chercher le maximum de technicité, de connaissances, d'enrichissement, de plaisir et de perfectionnement.
Une journée d'enseignant réussie, c'est quand en fin de cours les élèves vous disent, ah Monsieur on aime trop faire cours avec vous, c'est trop bien. Ou quand je leur montre des choses et qu'elles me disent ah mais je n’aurais jamais pensé qu'on puisse faire ça comme ça, quand j'ai vraiment la satisfaction, l'impression qu'il y a du sourire en face, du bien-être et que j'ai pu capter les élèves pendant 3h, pendant 4h, sans qu'il y ait de lassitude.
Aussi mais heureusement, ça arrive rarement, ça arrive au tout début quand on est jeune coiffeur. Une journée de coiffeur réussie, c'est la satisfaction de, toute la journée voir toutes les clientes, tous les clients qui rentrent, qui sortent, qui viennent vous voir tout simplement pour vous saluer, qui viennent vous voir et qui vous disent "de toute façon chaque fois que je viens chez vous je suis content", qui repartent avec une transformation et qui vous disent "mais c'est exactement ce que je voulais", oui voilà c'est tout ça, c'est un épanouissement.
J'allais dire espoir mais aussi connaissance, ouverture, ouverture sur la réalité du métier, voilà la démonstration de la réalité du métier.
Je pense qu'il y aurait tellement de choses à dire... parce que c'est tellement épanouissant... Je pratique depuis peu ce métier d'enseignant que je viens de découvrir, j'ai attaqué en septembre, mais il n’y a pas une semaine où je ne prends pas du plaisir en échangeant avec ces jeunes, en découvrant des profils complètement différents, des besoins complètement différents et quand je parle de cette classe, je m'aperçois que finalement, j'ai j réussi à discuter avec eux, à échanger, à leur apprendre des choses, à rire avec eux. Pour moi c'est juste énorme, un épanouissement énorme, je ne m'y attendais pas du tout.
La casquette, le taper. On fait aussi de la permanente sur les garçons depuis 2 ans, on coupe très court dessous et on permanente dessus, et le mulet revient beaucoup dans le milieu sportif, notamment chez les rugbymen. Il y a beaucoup de rugbymen, on le voit même au niveau de l'international, qui font le mulet. On peut le retrouver chez des femmes aussi, alors on n’a plu le mulet des années 80, mais on peut le retrouver, les coupes sont plus tendances, remises au goût du jour, mais les deux se font.
Ah moi je vais préférer faire le mulet, il y a beaucoup plus de travail, c'est beaucoup plus technique, il y a plus de recherche, mais ça ne convient pas à tout le monde.
Alors je vais dire mon meilleur souvenir, il est très proche d’ici. Quand j’étais gamin, j’étais à l'école juste derrière et j'avais un professeur de CE2, monsieur Chaix, qui était un instit qui nous racontait un petit peu l'histoire de France et j'ai toujours eu ce plaisir, cette joie à l’écouter, et je me souviens qu'avec lui, l'école était facile. J’ai toujours ce plaisir quand je passe près de cette école Cornélie Gémond (Ndlr à Grenoble, proche du rectorat) à me souvenir de ces bons moments. Pourtant j'ai eu plusieurs enseignants dans cet dans établissement, mais lui, ça restera le bon moment de l'école. Voilà c'est mon bon moment de l'école, c’est Monsieur Chaix en CE2.
"Questions-Réponses", une série de podcasts de l'académie de Grenoble qui mettent en lumière les métiers des Hommes et Femmes de l'académie à travers des interviews courtes et inspirantes.
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Mise à jour : décembre 2023